France : la ruée vers l’or des gélules miracle
Pharmacies, internet, magasins… Les compléments alimentaires conquièrent les Français et font prospérer toute une industrie.
Dans une société obsédée par l’optimisation de soi, où l’alimentation industrielle déçoit en matière de santé, les compléments alimentaires ont conquis leur public. En France particulièrement, ils sont désormais partout et se déclinent sous de multiples formes.
Stress chronique, fatigue hivernale, digestion capricieuse, articulations douloureuses, ballonnements… pour chaque mal du quotidien, il existe désormais toute une gamme de gélules miracles, comme le révèle une récente enquête du Monde sur cette industrie florissante.
Arkopharma propose ainsi des produits ciblant immunité, digestion et soins cutanés ; Forté Pharma mise sur le bien-être et la performance physique ; certaines marques vont jusqu’à créer des gommes à mâcher pour rendre la prise plus agréable, à l’image de Mium Lab.
Baptisés « gummies » et adaptés au régime vegan, les produits de cette startup fondée en 2019 par David Gueunoun sont présentés comme « innovants » pour leur forte teneur en différentes souches de probiotiques. Les Français y adhèrent donc massivement, alimentant la croissance spectaculaire de ce secteur.
Un marché à 2,9 milliards d’euros
« C’est simple, j’ai toujours été dans le métier et, à bientôt 60 ans, je n’ai pas le souvenir d’une seule année où le marché a connu une baisse », témoigne dans les colonnes du Monde, Benoît Lemaire, directeur général d’Activ’Inside, entreprise qui détient plus de 17 brevets et 20 publications scientifiques pour ses ingrédients actifs.
En l’espace d’une décennie, ce marché autrefois confidentiel a pratiquement doublé ses ventes, atteignant 2,9 milliards d’euros en 2024 selon la dernière étude du Syndicat National des Compléments Alimentaires (Synadiet), soit une progression de 5,7% en un an.
Ce dynamisme attise naturellement les convoitises. « C’est assez fou. Pas un mois ne passe sans que l’on voie de nouveaux arrivants« , observe Alexandre Garnier, cofondateur de Novoma, startup toulousaine qui réalise déjà 12,5 millions d’euros de chiffre d’affaires douze ans seulement après sa création.
Les géants pharmaceutiques en première ligne
Dans cette course effrénée pour une part gâteau, les géants pharmaceutiques sont en première ligne. Après tout, pourquoi se contenter de soigner quand on peut prévenir en amont ?
« Les délais de recherche et développement sont plus rapides, du fait de contraintes réglementaires moins lourdes que pour un médicament« , explique au quotidien du soir, Thierry Verne, PDG d’Olyos, maison mère du laboratoire Granions.
Ainsi, les pharmacies restent largement en tête des circuits de distribution, avec notamment 55% des parts de marché en 2024. Cela représente une croissance de +8% par rapport à 2023.
« L’offre s’est certes étoffée, mais elle s’est aussi spécialisée. Les pilules miracles ont peu à peu laissé place à des produits plus techniques, qui s’éloignent du marché de masse« , décrypte Nicolas Grelaud, directeur général d’OpenHealth Company, observateur privilégié de cette transformation depuis dix ans, interrogé par Le Monde.