La révolte fiscale des géants français
Une vague de contestation patronale déferle sur la France en ce début 2025, avec une dénonciation tous azimuts d’une fiscalité nationale perçue comme trop contraignante.
Ce n’est jamais bon signe de voir les capitaines d’industrie d’un pays s’élever contre les pouvoirs publics, ceux de la France en l’occurrence. C’est encore plus inquiétant lorsque cela vient du plus illustre d’entre eux.
Profitant de l’annonce des résultats annuels de son entreprise LVMH mardi 28 janvier dernier, Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France a mené une véritable charge contre le projet gouvernemental de hausse de l’impôt sur les sociétés.
La taxation appliquée aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel atteint au minimum trois milliards d’euros, devrait notamment monter à 40%, dans le cadre du budget 2025 actuellement débattu à l’Assemblée nationale. Un comble pour M. Arnault, dont les mots n’auraient pu être plus durs.
Il a ainsi fustigé une mesure assimilable à une taxe sur le « made in France », un contraste avec la situation aux États-Unis où « les impôts vont descendre à 15 % et où les ateliers sont subventionnés dans une série d’États » avec les encouragements du nouveau président Donald Trump.
Entre sentiment d’exaspération et menaces
Surtout, le dirigeant numéro un mondial du luxe a laissé entendre l’hypothèse d’une délocalisation de ses activités à l’étranger, notamment aux États-Unis où il ferait l’objet de plusieurs sollicitations. Une menace favorablement accueillie par le Medef.
Le président du syndicat patronal, Patrick Martin, a ainsi évoqué le 30 janvier sur les colonnes de RTL, une « incompréhension qui tourne à la colère » chez ses adhérents, face à la politique fiscale française. Quelques jours plus tôt, Ben Smith, directeur général d’Air France-KLM, joignait sa voix à ce concert de protestations.
Le patron de la compagnie aérienne est allé jusqu’à qualifier d' »irresponsable » la hausse annoncée de la taxe sur les billets d’avion (TSBA), même si celle-ci a été réduite de 250 millions d’euros par le Sénat. Du côté des salariés, la réplique ne s’est pas fait attendre.
Une mansuétude qui a trop duré
« Il faut arrêter de se moquer du monde », a rétorqué la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet, dénonçant des réactions indécentes de la part de ces chefs d’entreprises.
Pour la responsable syndicale, les propos de Bernard Arnault sont « à l’image des grands patrons » qui « coulent le pays » et n’en ont « plus rien à faire de l’intérêt général », avec comme unique objectif « l’appât du gain ».
Elle rappelle par ailleurs que les impôts appliqués aux grandes entreprises ont baissé sous le règne du président Emmanuel Macron. C’est peut-être cela l’origine de cette levée de boucliers.
Ces dirigeants d’entreprise auraient-ils si longtemps bénéficié de la mansuétude présidentielle en matière de taxation qu’un retour à plus d’impôts fait jaser ?